Face à l’augmentation constante des dépenses de santé et pour répondre à la problématique de l’acquisition de jours de congés payés pendant les arrêts de travail, le gouvernement et le législateur se sont saisis de ces questions. Mais les entreprises ont elles aussi un rôle majeur à jouer pour agir sur le nombre d’arrêts de travail.

Nos avocats en droit social et droit du travail décryptent pour vous les mesures déjà entrées en vigueur (notamment via la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024) et celles à venir autour de la réglementation applicable aux arrêts maladie.

Les mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 pour diminuer le coût des arrêts maladie

L'explosion du nombre d'arrêts de travail 

Ces dernières années, le nombre d’arrêts de travail a explosé : plus de 30% en 10 ans, avec 6,4 millions d’arrêts de travail en 2012 contre 8,8 millions en 2022.

Cette tendance, qui n’est pas à la baisse et n’est pas le seul fait de la crise du COVID-19, a un coût pour les finances de l’Etat. En effet, le financement des Indemnités Journalières de Sécurité Sociale (IJSS) représente 16 milliards d’euros par an. Si la dynamique se poursuit, ce coût serait porté, en 2027, à 23 milliards d’euros par an.

Au-delà du coût des arrêts de travail pour la collectivité, les arrêts maladie des salariés ont également des conséquences financières et organisationnelles, directes et indirectes, pour les entreprises : complément de salaire, coût du recours au CDD et/ou à l’intérim, dégradation de la productivité, etc.

Des mesures ont donc été prises dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 dans le but de ralentir cette tendance.

Les mesures pour limiter l'impact de cette augmentation

Afin de lutter contre l’augmentation du nombre d’arrêts de travail, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 comporte deux mesures principales :

La limitation des arrêts de travail délivrés en téléconsultation

Depuis le 1er janvier 2024, le principe est que la prescription ou le renouvellement d’un arrêt de travail en téléconsultation ne peut pas excéder 3 jours, ni avoir pour effet de porter à plus de 3 jours la durée d’un arrêt de travail déjà en cours.

Comme tout principe, celui-ci connait des exceptions :

  • La prescription ou le renouvellement de l’arrêt de travail par le médecin traitant ou la sage-femme référente de l’assuré
  • L’impossibilité justifiée par le patient de consulter un professionnel médical compétent pour obtenir, par prescription en présentiel, une prolongation de l’arrêt de travail

La suspension directe des IJSS

En cas de rapport du médecin contrôleur concluant à l’absence de justification de l’arrêt de travail ou de sa durée, le versement des IJSS est suspendu.

⚠️ Cette mesure n’a toutefois pas passé l’examen du Conseil Constitutionnel et n’est donc pas entrée en vigueur.

Les mesures pour mettre en conformité le droit français au droit européen en matière d'acquisition des congés payés 

Parallèlement à ces problématiques en lien avec le coût des arrêts de travail, le droit français va aussi devoir être réformé en 2024 pour se mettre en conformité avec le droit européen en matière d’acquisition des congés payés en cas d’arrêt de travail pour raison de santé.

Les règles non conformes au droit européen

En effet, le 13 septembre 2023, la chambre sociale de la Cour de cassation a censuré, en raison de leur non-conformité au droit européen, les règles nationales selon lesquelles :

  • Le salarié en arrêt de travail pour maladie de droit commun n’acquiert pas de congés payés
  • Le salarié en arrêt de travail pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle acquiert des congés payés dans la limite d’une année

Pour en savoir plus sur le revirement de jurisprudence concernant l’acquisition de congés payés en cas d’arrêt de travail, consultez notre article dédié.

Les dispositions d'adaptation au droit européen

Afin de mettre en conformité le code du travail français avec le droit européen, le Gouvernement a édicté un amendement au projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union-Européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole.

Ce texte qui n’est, à ce stade, qu’à l’état de projet, prévoit ce qui suit :

Concernant l’acquisition des congés payés au cours d’un arrêt de travail

  • L’arrêt de travail pour maladie de droit commun permettrait d’acquérir des congés payés à hauteur de 2 jours ouvrables de congés payés par mois (contre 2,5 jours ouvrables en cas de travail effectif).
  • Dans la même logique, le calcul de l’indemnité de congés payés serait adapté et la rémunération correspondant aux périodes d’arrêt maladie ne serait prise en compte qu’à hauteur de 80%.
  • L’arrêt de travail suite à un accident du travail ou une maladie professionnelle continuerait à ouvrir droit à 2,5 jours ouvrables de congés payés par mois, mais désormais sans limitation de durée.

Concernant le report des congés payés acquis pendant un arrêt de travail

  • Une période de report de 15 mois pour prendre les congés payés acquis et non pris en raison d’un arrêt de travail, qui pourrait être allongée par accord d’entreprise ou de branche.
  • Le point de départ de cette période dépendrait de la durée de l’arrêt de travail.

Concernant la question de la rétroactivité et de la forclusion

L’acquisition des congés payés pendant les arrêts maladie de droit commun ainsi que les nouvelles règles de report seraient applicables du 1er décembre 2009 (entrée en vigueur du Traité de Lisbonne) jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi.

Les salariés encore en poste disposeraient d’un délai de 2 ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi pour initier une action judiciaire concernant les périodes antérieures à l’entrée en vigueur de la loi, sous peine de forclusion (déchéance d’un droit non exercé dans les délais prescrits).

Quelles mesures mettre en place dans l'entreprise pour réduire les arrêts de travail ?

La limitation des impacts des arrêts de travail sur l’entreprise est essentielle et suppose d’agir à la source.

Mettre en place des actions de fond

Au-delà des actions récompensant le présentéisme (comme par exemple, l’instauration d’une prime d’assiduité), des actions de fond peuvent être mises en place pour réduire l’absentéisme et les arrêts de travail. Le choix et la mise en place de ces actions supposent au préalable de procéder à des analyses pour comprendre et agir sur les causes même de l’absentéisme.

Améliorer la qualité de vie au travail 

La corrélation faite entre le niveau d’absentéisme et la Qualité de Vie au Travail (QVCT) n’est plus à démontrer. En effet, des conditions de travail dégradées sont un facteur favorable à l’augmentation de l’absentéisme des salariés, et donc des arrêts de travail.

Pour en savoir plus sur la mise en place d’une démarche QVCT au sein de votre entreprise, consultez notre article dédié.

Mettre en place des actions préventives

Ainsi, il est non seulement primordial d’avoir un bon suivi de votre taux d’absentéisme mais aussi de mettre en place des actions préventives et des politiques adaptées pour réduire les arrêts de travail. Cela passe notamment par :

  • Mettre en place une démarche de prévention autour de thèmes multiples (gestes de premiers secours, sensibilisation aux addictions, détection des troubles visuels et auditifs, etc.)
  • Améliorer la communication et le dialogue social au sein de l’entreprise, permettant d’identifier les éventuelles difficultés et donc de pouvoir agir mieux et plus rapidement
  • Veiller à un management respectueux et adapté, et le cas échéant former les managers, leur rôle étant déterminant dans l’ambiance de travail au sein des équipes
  • Mettre en place des dispositifs permettant aux salariés de favoriser l’équilibre entre leur vie personnelle et vie professionnelle (télétravail, déconnexion, aménagement et/ou flexibilité des horaires…).

Pour en savoir plus sur les leviers d’amélioration de la gestion des accidents du travail et des maladies professionnelles, consultez notre article dédié.

 

 

Pour en savoir plus sur la gestion des arrêts maladie en entreprise,
téléchargez notre document de synthèse : 

Arrets de travail

 

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