27.11.20
Découvrez la synthèse de notre indicateur hebdomadaire réalisé auprès de 1000 dirigeants de PME et ETI, en partenariat avec l'Entreprise DU FUTUR.
Selon notre enquête, seule la moitié des sociétés interrogées a finalisé la construction de ses différents scénarii budgétaires pour 2021. En revanche, les scénarii concernant l’expérience client sont presque unanimes : l’heure est à la refonte. Aujourd’hui, 83% des dirigeants souhaitent revoir l’expérience proposée à leurs clients, dont 62% à part égale entre physique et digital.
C’est précisément cet aspect « phygital » qui intéresse depuis plusieurs mois Aurélien Berthelet, Directeur Général de l’entreprise de transport et de tourisme Berthelet. Alors que l’incertitude touche de plein fouet le secteur du Tourisme, son objectif est de reconstruire l'activité le plus rapidement possible, en réfléchissant à d'autres stratégies.
Les chiffres clés de l'indicateur hebdomadaire
- Semaine du 23 au 27 novembre 2020 -
Découvrez l’interview d'Aurélien Berthelet, Directeur Général de Berthelet
Créée en 1946 par Robert Berthelet, l’entreprise éponyme est aujourd’hui un acteur majeur de la mobilité de la région Rhône-Alpes. Les activités de cette PME familiale sont partagées en deux principaux secteurs : le transport routier de voyageurs, avec près de 30 000 utilisateurs quotidiens, et l’organisation de voyage, avec 6 agences dédiées. Résolument tournée vers l’innovation, notamment au sujet de la transition énergétique et du digital, l’entreprise sait s’adapter aux demandes de ses clients depuis plus de 70 ans.
Q : En tant qu’acteur du secteur touristique, avez-vous activé les différents dispositifs gouvernementaux ?
Aurélien Berthelet : L’activité de Berthelet se répartit entre le transport public d’un côté, et le transport touristique de l’autre. Lors de la première vague, nous sommes donc passés de 100% d’activité à seulement 5%. Pour faire face à cette hécatombe, nous avons choisi de mettre en place les différents dispositifs proposés par l’Etat : chômage partiel, Prêt Garanti par l’Etat, report du financement de nos véhicules, exonération de charges sociales…
Tous ces dispositifs ont été d’un grand secours pour notre secteur. En revanche, nous avons dû batailler avant d’être reconnu comme relevant du Plan Tourisme. En effet, le transport de voyageurs n’était pas inclus dès le départ : nous avons alors fait appel aux syndicats professionnels et aux autorités régionales pour nous faire entendre.
Malgré la présence de ces aides, notre principale insatisfaction se situe sur le manque de visibilité quant à leur durée. Si je prends l’exemple du Plan tourisme, il a dans un premier temps été mis en place jusqu’au 30 septembre. Il a ensuite été prolongé d’un mois, jusqu’au 31 octobre, puis de nouveau jusqu'au 31 décembre. Aujourd’hui, il nous est impossible de prévoir quand il s’arrêtera. Et nous avons le sentiment d’avoir une épée de Damoclès au-dessus de la tête, ne sachant pas quand et à quelle vitesse la « perfusion » sera retirée.
En attendant, nous faisons notre possible pour construire plusieurs scénarii de relance de l’activité en interne, mais sans aucune visibilité sur la durée des aides et sur les conditions de la reprise. Il est difficile de réellement anticiper. Nous espérons surtout que les efforts faits par le Gouvernement pour maintenir l’économie ne se relâcheront pas. Car même lorsque la pandémie sera contrôlée, le combat contre la crise économique sera loin d’être terminé.
Q : Cette crise sanitaire a-t-elle remis en cause vos prévisions d’investissement ?
Aurélien Berthelet : En tant qu’entreprise du transport public, nous avons une politique d’investissement dynamique et dirigée vers la transition énergétique. Berthelet a déjà une flotte importante de véhicules fonctionnant au BioGNV (gaz naturel obtenu par méthanisation de déchets organiques). Cette transition vers des véhicules plus propres doit se poursuivre, peu importe les obstacles, car elle représente une véritable attente des partenaires publics.
Cela étant dit, il y a quand même une très forte inconnue : nous ne savons pas quel visage aura l’entreprise à la sortie de la crise. Nous avons beau travailler nos prévisions, nous ne savons pas laquelle se réalisera. A quel niveau seront nos dettes, aura-t-on besoin de financements importants liés au BFR et à la reprise d’activité… Ce sont des équations à multiples inconnues.
Malgré toute la complexité de la situation, il faut que nous restions sur des modes de fonctionnement agiles, ce qui fait partie de l’ADN de l’entreprise. Cette adaptabilité, est d’ailleurs la force des PME familiales : nous pouvons prendre des décisions rapides et les assumer tant auprès de nos collaborateurs que des parties prenantes extérieures.
Pour cela, nous devons également maintenir la communication avec nos partenaires bancaires. Avant la crise sanitaire, ils étaient fortement mobilisés pour nous accompagner dans notre stratégie de développement. Aujourd’hui, ils sont dans une véritable optique de partenariat, nous savons qu’ils continueront à l’être. Malgré tout, au sortir de la crise, les chiffres seront là : beaucoup d’entreprises seront sans doute en difficulté financièrement. Il faudra donc que le système bancaire s’adapte dans sa compréhension et dans son appréhension de la notation des sociétés. Tout le monde va devoir être agile et innovant : c’est un nouveau paradigme.
Q : La crise sanitaire change-t-elle la stratégie de développement de Berthelet ?
Aurélien Berthelet : Depuis 2015, nous sommes dans une stratégie de croissance externe et de diversification de nos activités. Nous avons développé notre réseau d’agences de voyages, à la fois grâce à des rachats et à des créations, ce qui porte désormais notre activité vers un équilibre transport public / transport touristique.
Malheureusement, en ce qui concerne notre branche tourisme, le chiffre d’affaires est à zéro pour cette année. Nous attendons avec impatience le redémarrage de ce secteur, qui entrainera sans doute une reprise d’activité des compagnies aériennes et des groupes hôteliers, avec lesquels nous travaillons étroitement.
Nous savons pertinemment que certaines de nos activités seront plus faciles à reconstruire que d’autres. Nous avons la volonté de sortir de cette crise avec le moins de dégât possible, mais celle-ci nous pousse à réfléchir à d’autres stratégies, sur la propriété du capital notamment. Aujourd’hui, nous fonctionnons très bien avec des fonds 100% familiaux, mais notre développement par croissance externe ajouté à la pandémie accélère des réflexions sur ces sujets-là.
Notre objectif est de reconstruire l’activité le plus rapidement possible autour de 2 axes bien définis : poursuivre nos engagements sur la transition énergétique et accélérer notre transformation digitale. A ce sujet, nous avons créé une agence de voyages dématérialisée : les clients peuvent prendre rendez-vous le soir ou le weekend, et bénéficier d’un conseil humain et personnalisé depuis chez eux. Cette nouvelle manière de consolider la relation client, en mode phygital, est un projet auquel nous croyons vraiment.
Le voyage sera toujours au cœur des envies du grand public, et nous comptons bien être moteur dans les changements à venir pour ce secteur.